Note de l'éditeur

Le présent numéro de Ressources marines et commercialisation vous propose trois articles sur l’aquariophilie marine qui, réunis, constituent un passionnant tour d’horizon mondial de la filière, du quotidien des pêcheurs vivant dans les petits villages côtiers de la région Indo-Pacifique aux habitudes d’achat des aquariophiles aux États-Unis.

Le premier article, rédigé par Gilles Lecaillon et Sven Michel Lourié, fait état des dernières évolutions relatives à la collecte et à l’utilisation de post-larves de poissons de récif, à savoir de jeunes poissons capturés juste avant leur colonisation du récif. Les auteurs décrivent les dernières méthodes en date de collecte et de grossissement des post-larves ainsi que leur application dans la région Indo-Pacifique. Ils ont bon espoir que ces techniques pourront être mises à profit pour alimenter le marché du poisson d’aquarium ainsi que d’autres marchés, mais indiquent qu’il sera nécessaire de poursuivre les recherches et la sensibilisation pour que cet espoir se concrétise.

Dans le deuxième article consacré à l’aquariophilie, Gayatri Reksodihardjo-Lilley et Ron Lilley étudient de près le volet offre de la filière en s’appuyant sur une étude de cas portant sur les villages de pêcheurs du nord de Bali. Ils dépeignent les habitudes de pêche et les conditions de travail des pêcheurs, ainsi que la très intéressante dynamique commerciale du secteur, du collecteur à l’exportateur en passant par toute une série d’intermédiaires. La conclusion qui s’impose est que la filière de l’aquariophilie indonésienne doit être réformée. Pour ce faire, l’une des clés serait d’amener les acteurs du volet demande, dont les importateurs et les exportateurs, à collaborer plus étroitement avec les pêcheurs en vue d’améliorer leurs conditions de travail, la qualité de leurs produits et la gestion des récifs.

S’intéressant cette fois au volet demande de l’aquariophilie marine, Breck McCollum passe en revue le point de vue et les préférences des amateurs d’aquarium d’eau de mer aux États-Unis. À l’instar de ses confrères Reksodihardjo-Lilley et Lilley, McCollum postule qu’une réforme de la filière aquariophile est indispensable pour préserver les ressources et améliorer la condition des pêcheurs. L’auteur estime que les informations mises à la disposition des aquariophiles et du grand public taisent en grande partie l’incidence désastreuse qu’a la filière sur l’environnement et la santé des pêcheurs, et qu’il est indispensable d’améliorer les messages publics sur ces questions pour ébranler les préférences du consommateur, obligeant ainsi les acteurs du volet offre de la filière à procéder aux changements nécessaires.

Vous trouverez également dans ce numéro deux articles consacrés à la filière du poisson de récif vivant destiné à l’alimentation.

Noel Chan et Brian Johnston nous font part des résultats d’un test de dégustation en aveugle, organisé à Hong Kong, où les participants doivent goûter des spécimens d’un poisson de bouche très apprécié, le mérou bossu (Cromileptes altivelis), et tenter de distinguer les poissons capturés dans le milieu naturel des poissons d’élevage. En général, les sujets affichent une préférence pour la couleur, le goût et la texture du poisson sauvage, mais trouvent le poisson d’élevage tout à fait acceptable. D’après les auteurs, l’expérience laisse présager un accueil largement favorable des produits d’élevage sur les marchés.

Ensuite, Helen Scales et les co-auteurs de l’article étudient sous deux angles distincts le commerce des poissons de récif vivants destinés à l’alimentation. D’une part, après analyse d’une longue série chronologique de données sur les importations de Hong Kong, ils font part des tendances troublantes dans l’expansion géographique de la filière, des alternances de forte expansion et de récession dans les pays fournisseurs et d’une exploitation à tous les niveaux de prix. D’autre part, en s’appuyant sur des registres détaillés conservés par les négociants en poisson, ils s’attachent de plus près à la filière du poisson récifal destiné à la restauration au nord de Bornéo et y détectent des signes de déclins marqués et assez rapides des stocks des poissons ciblés.

Dans son article, Being Yeeting retrace l’histoire de la filière du poisson vivant d’aquarium et de bouche dans la région océanienne et fait le point sur les activités menées dans le cadre de l’Initiative régionale de la CPS concernant le commerce de poissons de récif vivants, dont le but est d’améliorer la gestion des filières aquariophile et alimentaire. Pour conclure ce numéro, la Section publications vous propose un aperçu des travaux d’un atelier qui s’est tenu l’an dernier autour des aspects économiques et des questions de commercialisation liés à la filière du poisson de récif vivant destiné à la restauration. Vous retrouverez dans son intégralité l’article rédigé par Brian Johnston au sujet de l’atelier. L’auteur décrit dans les grandes lignes un projet de recherche financé, pour une période de trois ans, par le Centre australien pour la recherche agricole internationale (ACIAR) (l’atelier étant une composante du projet) et présente un résumé des nombreux exposés de l’atelier.

Tom Graham

Sommaire